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Copenhague, Stockholm : deux capitales de la mode scandinave. Dans le courant du mois d’août et du mois de février, bien en amont de leurs consœurs Paris-Londres-Milan, ces deux haut-lieux du lifestyle européen accueillent leurs Fashion Week Trade respectives et donnent ainsi à des marques tricolores l’occasion de se présenter auprès des acheteurs locaux : « Les Danois et les Suédois apprécient que les marques françaises répondent aux enjeux de durabilité. Il y a de la place pour de petites marques de niche, avec un savoir-faire ou une démarche identifiée, qui privilégieraient la qualité et la longévité des matières », expliquent Annemette Jensen et Soline Rémond, conseillères export sur le secteur Art de Vivre pour Business France, respectivement sur les marchés danois et suédois.

La mode nordique s'intéresse au Made In France

UNE LENTE MAIS REELLE REPRISE POST-COVID

Dans le cadre de la Stratégie nationale en faveur des métiers d’art, ces deux spécialistes du développement international accompagnent en effet les entreprises issues de cet écosystème sur les marchés nord-européens, et la mode constitue un secteur ouvert à des opportunités. « Si l’industrie de la mode a traversé des difficultés à la suite de la crise sanitaire, la conjoncture sur ces marchés présente des signaux positifs, avec un recentrage sur le less is more », confirme Annemette Jensen. Au Danemark en 2023, les ventes de vêtements ont en effet progressé de 3% en valeur, tout en perdant 1,5% en volumes. Pendant ce temps, en Suède, les ventes ont connu une hausse de 4,7% et la croissance annuelle du secteur attendue sur la période 2024-2029 se situerait autour de 2% (chiffres Statista). « Les consommateurs de ces pays témoignent toujours d’un attachement à la mode, pour laquelle ils consacrent un budget élevé », confirme Soline Rémond : en 2023, on estimait à environ 800 euros le budget moyen annuel consacré à l’habillement en Suède. Et, selon des analystes du marché, les marques de qualité à fort développement proposent toutes des prix par pièce aux alentours de 200 ou 300 euros.

DES CONSOMMATEURS EN QUÊTE DE CONFORT ET DE DURABILITE

Cependant, même si elles présentent des similarités (tendances au sportswear, jeanswear, minimalisme), les cultures vestimentaires danoises et suédoises doivent être considérées à part : « Si les Suédois sont très sensibles à l’aspect prescriptif de la mode et aux tendances de chaque année, les Danois sont capables d’oser s’habiller différemment pour imposer leur style personnel, note Annemette Jensen. D’où une certaine curiosité pour des marques plus niche et avant-gardistes ». Le confort, les matières et le prix resteront cependant les critères numéro un pour imposer une nouvelle marque, avant même le design ou la notoriété.

Au cœur des marchés suédois et danois, les considérations environnementales et locales prennent une importance croissante : le critère sustainable et la circularité deviennent des critères d’accès, surtout en Suède. Dans ce pays où le friluftsliv (littéralement « vie en plein air ») est une philosophie de vie, les consommateurs apprécient les marques qui prônent des matériaux naturels et des modes de production vertueux. « Dans la même veine, on note un rapatriement des productions scandinaves dans le pays d’origine, d’où la volonté des acheteurs de se sourcer en Europe quand il s’agit de trouver des matières premières », évoque Annemette Jensen qui a accompagné des acteurs suédois et danois au salon Première Vision pour rencontrer les représentants de la confection française.

 

PRIORITE AUX MARQUES SCANDINAVES

Car les principaux concurrents des acteurs français sur ces marchés suédois et danois restent… les marques suédoises et danoises. Aux célèbres suédoises Filippa K., Acne Studios, Totême, Rodebjer répondent les non moins célèbres danoises GANNI, ROTATE Birger Christensen ou Cecilie Bahnsen (sans éluder bien entendu le géant suédois de la fast fashion H&M). « C’est un marché concurrentiel où nous pouvons observer une tendance montante des marques scandinaves, surtout dans le retail physique, explique Soline Rémond Au Danemark par exemple, il n’y a presque plus de chaînes de magasins multimarques, ce sont essentiellement des chaînes monomarques locales, ou bien des boutiques individuelles multimarques. Les chaînes locales dominent à un tel point qu’un mastodonte comme ZARA ne dispose que de quatre boutiques au Danemark ».

 

MAIS LE MADE IN FRANCE GARDE UNE AURA SUR CES MARCHES

Cependant, le made in France suscite toujours l’intérêt des consommateurs qui le découvrent et viennent l’essayer dans des concepts stores, des boutiques en propre ou des grands magasins, généralement après une première expérience en ligne. « En Suède, poursuit Soline Rémond, l’expérience d’achat est véritablement omnicanale : le consommateur passe des réseaux sociaux à la découverte en ligne puis l’essayage en boutique ; on a dépassé la notion de multicanalité et les boutiques sont devenues des showrooms ». D’où un chiffre croissant de consommation e-commerce, le digital représentant désormais 35% des ventes au Danemark et 25% en Suède.

 Dans ce contexte, ce sont des enseignes comme Isabel Marant, American Vintage, Sœur, Saint James ou les marques du groupe SMPC qui offrent une visibilité à l’offre française sur le marché, laquelle se situerait à la 14e position sur le territoire suédois (avec 2% de part de marché). « Il y a la possibilité d’augmenter cette part avec des opportunités de niche », témoigne Annemette Jensen qui cite la collaboration en 2023 de la bretonne Le Minor avec le designer et concept store Norse Projects, sur le marché danois. « Une grande partie de l’argumentaire tient dans l’histoire racontée et l’identité de marque, renchérit Soline Rémond. Il faut également justifier d’une solide implantation sur son marché domestique ou, à défaut, sur des marchés internationaux leader ». À Stockholm, le grand magasin historique Nordiska Kompaniet (dit NK) a ouvert ses portes à de nouvelles marques internationales et notamment à des marques de niche via le lancement d’un corner pop-up éphémère – une expérience dont a bénéficié la française Derhy.

LE CONCEPT STORE, VOIE ROYALE VERS LE CONSOMMATEUR SCANDINAVE

Au-delà des circuits grands magasins (NK et Åhléns en Suède, Magasin et Illum au Danemark), tout un réseau de magasins spécialisés dans les métiers d’art, le design et le lifestyle peuvent offrir des débouchés à l’offre française, notamment sur les accessoires (bijoux, lunettes, chaussures) – sur les bijoux, la France occupe une place de choix (seconde part de marché sur le segment métaux précieux, troisième sur les bijoux fantaisie). « Ces boutiques du type concept store, très populaires, s’organisent de plus en plus sous forme de chaînes, comme c’est le cas pour APLACE et JUS en Suède ou Another Nué au Danemark, signale Soline Rémond. Malgré cette structuration, il est important de passer par un agent pour couvrir un large réseau de boutiques et trouver le bon positionnement ».

 Car l’accès au marché reste un challenge pour les nouveaux fournisseurs, principalement en raison de la saturation du marché. « D’un point de vue logistique et réglementaire, ce sont des marchés faciles d’accès, souligne Annemette Jensen. Mais il faut se faire sa place, et investir du temps et de l’argent en communication ». Sur ce dernier point, le levier numéro un reste la participation événementielle, que ce soit sur les Fashion Weeks ou les salons du secteur (notamment le CIFF à Copenhague en janvier et en août). Ensuite, les réseaux sociaux doivent servir de courroie de transmission jusqu’au consommateur final : « Des influenceuses comme Pernille Teisbaek ou Emili Sindlev deviennent des éléments fortement prescripteurs du marché : il ne faut pas négliger les opportunités de collaboration avec certaines d’entre elles », signale Soline Rémond.

 Marché de proximité à fort pouvoir d’achat, la zone scandinave (et particulièrement les marchés danois et suédois) mérite d’être à nouveau explorée : « La stratégie d’approche sera forcément plus ciblée qu’avant le COVID mais la France a de quoi répondre à des besoins de niche, à la croisée de la mode et du lifestyle », conclut Annemette Jensen. « Même si le marché est concurrentiel avec un fort poids des grandes marques, le Made in France est toujours un argument de choix, surtout si l’enseigne démontre sa visibilité sur le marché domestique », confirme Soline Rémond.

ETUDE : LES OPPORTUNITES D'AFFAIRES POUR LES METIERS D'ART ET DU PATRIMOINE VIVANT FRANCAIS DANS LA MODE EN SUEDE

Le ministère chargé des petites et moyennes entreprises, du Commerce, de l’Artisanat et du Tourisme a mandaté Business France pour la réalisation d’une étude du potentiel et de l’accès du marché suédois pour les entreprises et artisans indépendants relevant du domaine des métiers d’art et du patrimoine vivant (EPV). Cette étude traite des catégories de produits suivantes : Mode, Accessoires et Confection.

 Pour en savoir plus sur les opportunités pour les entreprises des Métiers d’Art :

Découvrez :

  • Le replay de la présentation du marché de la mode en Suède pour les entreprises des Métiers d’Art  - Visionner le replay ici
  • L’étude complète sur le secteur en Suède (disponible gratuitement) - Télécharger l’étude complète ici 
  • Et, plus globalement, le Plan Métiers d’Art à l’export