En moyenne, chaque citoyen polonais dispose d'environ 1 500 m³ d'eau par an, une statistique alarmante comparée à la moyenne de l'Union européenne qui s’établit à 7 000 m³ par an et par habitant. Cette situation place la Pologne parmi les pays européens les plus vulnérables au « stress hydrique ». Si aucune solution n'est trouvée, l'eau pourrait devenir une ressource aussi précieuse que l'or, influençant l'inflation et les prix des biens et services.

Les changements climatiques accentuent ces défis. Bien que la quantité totale de précipitations ne devrait pas diminuer de manière significative, les schémas météorologiques irréguliers causent des périodes de sécheresse prolongée et des épisodes de précipitations torrentielles. Actuellement, le pays subit des périodes sans pluie plus longues, suivies de pluies intenses, provoquant des inondations en ville et mettant en lumière la nécessité d'adaptations structurelles. De plus, la collecte d'eau devient impérative pour assurer le développement économique et garantir l'accès à l'eau potable, essentielle à de nombreuses industries et notamment aux futures centrales nucléaires.

L'état vétuste de l'infrastructure hydraulique constitue un autre défi majeur. Selon les contrôles effectués par la cour des comptes, environ 67 % des réseaux d'eau ont entre 20 et 60 ans. Ces chiffres expliquent en partie pourquoi jusqu'à 30 % de l'eau prélevée est perdue avant d'atteindre les utilisateurs dans certaines régions. De plus, 25 % des Polonais n'ont toujours pas accès à l'assainissement ou aux systèmes de traitement des eaux usées.

Bien que des efforts aient été déployés en 2021, des investissements massifs sont nécessaires. La Pologne a investi 1,32 Md EUR dans la protection de l'eau, avec le secteur public contribuant pour 602 M EUR et les entreprises énergétiques et de traitement des eaux investissant 393 M EUR. Cependant, face à la gravité de la situation, davantage de financements sont essentiels. Le prochain cadre financier pluriannuel de l’Union européenne (2028-2034) est porteur d’espoir, avec le « Pacte bleu ¹ » .

Le gouvernement polonais a récemment adopté un programme de lutte contre la pénurie d'eau (2022-2027) avec une perspective jusqu'en 2030, dévoilant des chiffres et des objectifs concrets. Actuellement, la Pologne se classe avant-dernière en Europe en termes de ressources en eau, avec environ 1 500 m³ par an et par habitant. Le programme vise à augmenter la rétention d'eau de 7,5 % à 15 % d'ici 2030, avec la réalisation de 727 investissements, dont 94 structures de rétention d'eau (réservoirs) et 633 structures façonnant la rétention (ouvrages de retenue, régulation, etc.).

Des entreprises comme Sądeckie Wodociągi (société municipale d’eau et d’assainissement de Sącz) ont adopté des approches innovantes avec des chiffres concrets témoignant de leur succès. La mise en place d'un système de bilan d'eau avancé a permis la détection rapide des fuites contribuant à une réduction significative des pertes d'eau. Ces initiatives locales, bien que souvent limitées en termes d’échelle, démontrent l'efficacité des solutions innovantes.

La crise de l'eau en Pologne nécessite une compréhension approfondie des chiffres pour orienter vers des solutions pragmatiques. Les investissements massifs, tant au niveau national qu'européen, sont essentiels pour moderniser l'infrastructure hydraulique polonaise qui est vieillissante. Le Programme de lutte contre la pénurie d'eau offre un cadre d'action, mais sa mise en œuvre nécessitera une coordination et un engagement continus.

^1. Le « Pacte Bleu » est une initiative du Comité économique et social européen (CESE) qui vise à répondre aux défis mondiaux de la rareté de l’eau et de sa pollution. Cette initiative appelle à une approche unifiée dans l’ensemble de l’Union européenne afin d’éliminer la précarité hydrique et de garantir à tous les citoyens de l’Union un accès, en tant que droit humain, à des services d’approvisionnement en eau et d’assainissement sûrs et abordables.

Sources :

1. Malina Olejniczak , portalsamorzadowy.pl, 07 févr. 2024
2. Karolina Wysota, money.pl, 11 sept. 2023
3. Marek Siudaj, pap, 22 août 2023